[France] Alpes - Tête des Corridors (1988)
Carte topographique IGN Top25 au 1/25000e 3436 ET Meije - Pelvoux - Parc National des Ecrins
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A l'été 1988, je viens passer mes vacances en Oisans et je réalise pas mal de randonnées à la journée entre les vallées de la Romanche, de la Guisane et du Vénéon. Ayant mis un peu d'argent de côté, j'ai bien l'intention d'accrocher "à mon tableau de chasse" (Oh ! quelle vilaine expression...) quelques sommets glaciaires de niveau F ou F+. Je n'ai pas encore acquis l'expérience "alpinistique" et je m'en tiens à rechercher les "collectives" organisées par les bureaux des guides de La Grave ou de Briançon. Ma tentative de l'année passée sur la Grande Ruine ayant été couronnée de succès et ayant constaté que les panoramas depuis le sommet de la Pointe Brevoort étaient difficilement comparables à ceux dont on disposait sur le plancher des vaches (pas inintéressants certes mais VRAIMENT différents...), je vais donc cet été me joindre à des cordées collaboratives avec guide. Le 14 juillet dernier, la "collective" m'avait conduite sur les pentes et au sommet du Pic de l'Etendard, un sommet glaciaire assez débonnaire du massif des Grandes Rousses. Deux jours après, me voici au bien nommé Pied du Col à contrôler dans le coffre de la voiture si je n'ai rien oublié. En effet, c'est le grand jour : je monte voir de plus près La Meije, ce massif montagneux élancé qui m'a fasciné depuis ma plus tendre enfance (mes parents m'"obligeaient" à passer un mois de vacances d'été alternativement en Andorre ou en Oisans, quelle guigne...!). Alors, même ado, la beauté de ces paysages commençaient à m'interpeler... Bien que j'aie beaucoup rechigné à les suivre sur les sentiers pour atteindre un refuge et puis en revenir l'après-midi même ("Pourquoi tant de haine...?"), une fois adulte, je me suis pris d'une vraie passion pour la randonnée (Va comprendre, Charles...!) en me disant qu'aller jusqu'au refuge c'était beau (et bien souvent exceptionnel...) mais qu'aller fouler les sommets avoisinants, ça devrait être passionnant. C'est ainsi que j'ai consacré un peu de mon temps (et de mon argent...) à effectuer des courses d'alpinisme. Donc, cette troisième course glaciaire aura pour cadre le massif de la Meije d'abord avec l'idée de rejoindre l'un des seuls refuges des Ecrins inaccessible au randonneur pédestre (je veux dire sans équipement d'alpinisme et sans une connaissance d'évolution sur la glace...) puis, quitte à passer une nuit en altitude au pied de ma montagne "adorée", d'y effectuer une petite course glaciaire " pour voir ce que ça donnerait"...
Diaporama Jour 1 : Départ dans le milieu de matinée depuis le parking du Pied du Col pour suivre un bon sentier qui de lacet en lacet s'élève dans les pentes d'un coteau assez redressé recouvert d'alpages. Plus on se rapproche du bastion N du Bec de l'Homme plus l'herbe se fait rare jusqu'à disparaître du paysage environnant. On a eu 600m de montée bucolique avec des myriades de fleurs alpestres pour la plupart d'entre elles protégées puisqu'on évolue à l'intérieur des limites du Parc des Ecrins (edelweiss, lis martagon, lis orangé, etc.). Puis c'est le minéral qui nous prend d'un coup alors que l'on remonte pleine pente un éboulis recouvert d'un névé dans sa partie supérieure juste au pied du col du Bec. On est à 3065m. On vient parcourir 1400m de dénivelée mais, positivons, il n'en reste plus que 400, au moins... Au moins, disai-je, car c'est à partir de cette brèche située sur l'arête N du Bec de l'Homme que l'on va tenter de rejoindre le glacier du Tabuchet par le biais de la Vire Amieux qui présente un itinéraire de désescalade de la paroi détritique pour que l'on puisse poser le pied sur la glace (et depuis 1994, la fonte du glacier s'étant opérée, la déclivité s'est encore creusée entre la sortie de la vire et la hauteur de la glace...). Une fois sur le glacier du Tabuchet, on chausse les crampons pour louvoyer entre les crevasses du glacier sous le rempart W du Bec de l'Homme. A 3400m, la montée est quasiment finie en traversant le plateau neigeux qui précède l'arrivée à la base du Rocher de l'Aigle. Ouf ! Plus que quelques mètres de grimpette sur les éboulis jaunes pour atteindre la porte du refuge et s'adresser poliment au gardien "Bonjour ! Une mousse, c'est possible ?"...
Jour 2 : Pas besoin de partir tôt (de toutes les manières on est réveillés par ceux qui vont se mesurer à d'autres courses dans le coin : Traversée du passage du Serret du Savon pour retoindre le refuge du Promontoire via la Brèche de la Meije, les ascensions du Doigt de Dieu ou de la Meije orientale). C'est une course de haute montagne, certes, mais pas aussi dense que les autres... Alors, comme pour pas mal de personnes de notre cordée c'est la ou une des premières courses en montagne, le guide Robert Eiselé fait de la formation (c'est bien le but de ces courses collectives faciles destinées pour tout un chacun à apprendre les bons gestes pour évoluer sur un glacier). On part vers 7h30 pour se mesurer aux 280m de dénivelée qui vont nous conduire au sommet de la Tête des Corridors. Rien de difficile car la pente reste maîtrisée et il n'y a quasiment pas de crevasses à contourner. En tout cas l'ambiance est exceptionnelle alors que l'on évolue au pied des pics mythiques qui composent les arêtes de la Meije. Si près... mais si loin quand même car si l'on veut s'y rendre, il va falloir améliorer sa technique et envisager d'acquérir d'autres connaissances. et pas seulement celles qui permettent de marcher en crabe sur la neige avec des crampons et surtout pas sur la corde... Au sommet, dos aux arêtes de la Meije (impressionnantes ceci étant dit...) donc du côté du N, le paysage s'ouvre jusqu'au Mont-Blanc. On prend le temps de déguster avant de penser à redescendre. On emprunte le même itinéraire qu'à l'aller jusqu'au refuge. On récupère ses affaires et on s'engage dans la descente du glacier du Tabuchet pour rejoindre le départ de la vire Amieux, vire que l'on escalade avant de basculer définitivement dans l'éboulis qui descend du col du Bec. On retrouve les alpages vers 2200m où le bon sentier va nous emmener au parking du Pied du Col. Depuis le sommet de la Tête des Corridors, on aura descendu 2200m (en comptant les 30m de remontée au refuge et les 120m de la vire Amieux...). Histoire de se rassurer, les douleurs musculaires que l'on ressent dans les cuisses et les mollets, c'est normal...!
Et puis, cette belle balade au pays des neiges éternelles a un goût de "reviens-y donc"... La prochaine, c'est sûr (et même si les 1600m de dénivelée pour rejoindre le refuge de l'Aigle sont un belle épreuve d'endurance...), je reviendrai pour me mesurer à la Meije orientale ? Pour la petite histoire, ça n'a été possible que 6 ans plus tard... Mais quel pied !
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